HISTOIREL’Administration du cyberespace se mord les doigts après avoir diffusé une vidéo chantant les louanges de la censure d’Internet.
C’est un véritable hymne à la censure qui a fait son entrée sur le web chinois cette semaine. L’approche du Nouvel An lunaire est traditionnellement l’occasion de réjouissances dans les «unités de travail» du pays. Généralement, les jeunes employés préparent des spectacles de danse, des dialogues comiques ou des chansons, puis se produisent dans un théâtre devant la direction et les employés méritants.
Mardi, c’était au tour de l’Association pékinoise de l’Internet, devant un parterre réunissant tout ce que la Chine compte de stars médiatiques et de patrons de médias en ligne. A l’applaudimètre, c’est le spectacle du chœur de l’Administration du cyberespace, la police du web, qui a remporté le premier prix, rapporte le portail internet (en chinois) www.youth.cn.
Musique martiale, enthousiasme révolutionnaire, omniprésence du rouge, la censure décomplexée apparaît dans toute sa splendeur. L’administration n’a pas lésiné sur les moyens, puisque les paroles ont été écrites par Wang Pingjiu, auteur de l’hymne olympique des jeux de Pékin en 2008.
«Surveillant l’espace jour et nuit,
Commençant notre mission quand le soleil se lève à l’est,
Unifiés par la force de tous les êtres vivants
Dévoués à faire du village global le plus beau des paysages
Une puissance de l’Internet: là où il y a Internet, il y a le rêve de gloire
Une puissance de l’Internet: du lointain cosmos à mon village qui me manque
Une puissance de l’Internet : disons au monde que le Rêve chinois porte la Chine à son firmament
Une puissance de l’Internet: je représente ma nation dans le monde.»
Quant au compositeur Zhao Jialin, il fait partie de l’équipe à l’origine de Petite Pomme, le dernier tube à la mode. Plusieurs vidéos du spectacle ont disparu du web chinois, signalait jeudi le New York Times. Vérification faite, le clip est bien disponible sur le site de la «cyberadministration». Visible jeudi encore sur Tencent Vidéo, il ne l’est plus ce vendredi, en revanche il a fait son retour sur Youku. Mais un signe ne trompe pas : la rubrique des commentaires d’internautes est vide.
La police du Web qui s’autocensure, l’histoire serait trop belle. Pour l’instant, elle se contente d’empêcher les commentaires moqueurs que suscite immanquablement ce spectacle. Mais une chose est sûre : les censeurs, occupés à couper court aux sarcasmes déclenchés par un clip à leur propre gloire sont les premiers à comprendre l’absurdité de leur propre situation.
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